Installation d’un centre d’évaluation des migrants rue du Moulin Joly : une décision irresponsable

(LP/Julien Duffé.) pour le Parisien

Le quartier de la Fontaine au roi est le seul quartier prioritaire de la politique de la ville du 11e arrondissement. Il devrait comme le prévoit la loi, faire l’objet d’une vigilance particulière, afin d’éviter d’y concentrer les difficultés sociales et engager une action de rattrapage avec les autres quartiers du 11e arrondissement.

Pourtant, à rebours de ces objectifs, la Maire de Paris a décidé l’ouverture le 18 janvier 2016, au 5 rue du Moulin Joly, du Dispositif d’Évaluation des Mineurs Isolés Étrangers (DEMIE) géré par la Croix-Rouge pour accueillir les jeunes migrants primo-arrivants se présentant comme mineurs isolés étrangers.

Encore une fois ce sont les pauvres qui trinquent

Ce choix de cette localisation interroge et suscite une colère légitime de la part des habitants. Cette portion de la rue du Moulin Joly se situe en effet dans le secteur le plus pauvre du 11e arrondissement et l’un des plus pauvres de Paris.  Selon l’INSEE, le taux de pauvreté y concerne près d’un ménage sur deux (45,3% en 2014). Sur les 865 ilôts de Paris, ce secteur appartient aux 2% des îlots les plus pauvres (19e position). Près de quatre habitants sur dix sont directement issus de l’immigration (39,29%, INSEE 2010), soit le double de la moyenne parisienne.

 La création de ce centre dans la rue du Moulin Joly a également des conséquences désastreuses pour le cadre de vie, la tranquillité des habitats et les commerces pourtant déjà en difficulté.

Insultes, bagarres et occupation des équipements publics

 Alors que l’espace public et des équipements sont déjà saturés, cette décision a pour effet de créer un nouveau point de fixation dans notre quartier pour ces jeunes étrangers, dont certains, sont sous l’emprise de la drogue, qu’ils consomment sur l’espace public.

La configuration même de la rue du Moulin Joly, qui est particulièrement étroite, aurait dû interdire l’intervention d’une telle décision. A l’évidence, cette rue ne peut accueillir un tel dispositif, sans induire une proximité physique entre les migrants d’une part et les riverain.e.s et les passant.e.s.. Le cheminement normal sur les trottoirs, particulièrement exigus et aujourd’hui occupés par ces jeunes, n’est plus assuré en journée.

Cette situation est aggravée par l’attitude de la Croix Rouge. En dépit de demandes répétées, les responsables du Centre refusent de faire attendre les jeunes dans leurs locaux protégés par des grilles, laissant ces derniers errer sur la voie publique, avec les conséquences susmentionnées. Cette situation contraint les commerçants à réguler eux-mêmes le comportement de ces jeunes, à leurs risques et périls.

Nous nous retrouvons aujourd’hui dans une situation malheureusement parfaitement prévisible où certains de ces groupes de jeunes profèrent des insultes à l’égard des commerçants et des passants, notamment rue Jean-Pierre Timbaud, et font, par leur comportement, régner également un climat de tension, alimenté par des épisodes de bagarres.

Cette décision prive par ailleurs les habitants de notre quartier et en particulier les plus fragiles et les jeunes de l’accès aux rares équipements publics disponibles.   

Alors que notre quartier est le plus dense de Paris, qu’il accueille 17% de la population de l’arrondissement sur 14% de sa superficie et que l’espace public y est très rare, il a été décidé d’organiser la distribution de repas pour ces mineurs étrangers sur la place Marek Edelman, que ces derniers se sont aujourd’hui totalement appropriée. En particulier, les habitants du quartier n’ont plus accès aux installations sportives créées pourtant pour eux sur cette place, celles-ci servant désormais par les migrants qui s’en servent de zone d’attente.

Alors que notre quartier souffre d’un déficit reconnu d’espaces verts et que le square Jules Verne et le plus saturé de l’arrondissement, les familles populaires ne peuvent plus en jouir paisiblement. Une très large part des bancs du square sont squattés par des jeunes migrants qui y diffusent de la musique et y consomment du cannabis à la vue de tous et notamment de nos enfants.

« La mairie considère notre quartier, comme la poubelle du 11e arrondissement. »

S’il s’agissait de l’unique problème que rencontre notre quartier, on pourrait juger cette décision avec pragmatisme, mais elle vient s’ajouter à des gros problèmes qu’il est le seul des quartiers du 11e arrondissement à rencontrer.

A proximité de la rue du Moulin Joly, où ce centre a été installé, un phénomène de prières de rue s’est développé, obligeant la police à boucler tous les vendredis un vaste périmètre allant de la rue Jean-Pierre Timbaud à la rue Morand. Non loin de là se tient un marché sauvage, dont la maîtrise, ne tient qu’à la seule occupation continue du terrain par la police et les services de la Mairie. Une importante activité prostitutionnelle asiatique et aujourd’hui sud-américaine prospère également à quelques dizaines de mètres du Centre de la Croix Rouge, sur la rue de la Présentation qui prolonge la rue du Moulin Joly.  La principale zone de trafic de drogue sur l’espace public du 11e arrondissement est située non loin de là, à l’angle rue de Vaucouleurs/ rue de l’Orillon, sans réponse de la part des pouvoir publics.

Avec cette décision donc, la concentration des problématiques a franchi un nouveau palier et rend la situation insoutenable. Nous sommes devant une situation grave que la Maire de Paris a créée de toutes pièces, en important dans notre quartier, un problème qui n’existait pas, avant sa décision. Pour reprendre une expression d’une habitante de la rue de la Présentation « La mairie considère notre quartier, comme la poubelle du 11e arrondissement. »       

La circonstance que dans notre quartier, l’abstention aux élections atteint des records et qu’une large part de sa population ne dispose pas du droit de vote, n’autorise pas pour autant la Maire de Paris à y faire n’importe quoi. Sinon quelle en sera la prochaine étape ? Une salle de shoot ?

Nous le disons clairement, nous n’accepterons plus que la Mairie de Paris se défausse de sa responsabilité sur le dos des habitants les plus pauvres du 11e arrondissement pour mieux exonérer les quartiers les plus riches et gentrifiés de Paris et du 11e arrondissement de tout effort et préserver leur tranquillité.

Ce centre doit être transféré dans un autre quartier du 11e arrondissement. Dans cette attente, la présence permanence d’agents de la ville de Paris sur le site de de 8h à 20h. Les repas doivent être organisés sur la place de la République, où pour des raisons de disponibilité d’espace, cette fonction serait mieux assurée que sur la place Marek Edelman, plutôt que sous les yeux parfois envieux des habitants de notre quartier.

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